Coursera : témoignage et retour d’expérience d’un « diplômé »

Lancée en avril 2012, la plate-forme Coursera propose des cours en lignes ouverts (plus de 200 à ce jour) et massifs (parfois avec plusieurs dizaines de milliers de participants) donnés par des professeurs enseignant dans des universités réputées du monde entier, dont l’EPFL à Lausanne.

Coursera et ses consoeurs ont ces derniers mois suscité un énorme intérêt de la part des médias. Nous nous sommes donc naturellement intéressés à son contenu et à ses principes de fonctionnement, le plus simple pour le faire étant de participer réellement à l’un ou l’autre des cours proposés. Plusieurs membres de l’équipe e-teach ont ainsi participé à l’expérience et en sont ressortis enthousiasmés.

Voici donc un retour d’expérience « vu de l’intérieur » faisant suite à ma participation durant 6 semaines au cours Gamification proposé par l’University of Pennsylvania (Prof. Kevin Werbach).

Ce cours traitant de l’intégration de mécanismes de jeu dans des environnements sérieux a été suivi par 81’000 étudiants dans le monde entier !

Coursera - Gamification

 

Un dispositif dynamique, varié et motivant

La formation de 6 semaines est certifiante (sous forme d’attestation d’assiduité – ce n’est pas un certificat officiel émis par l’université) et se décline de la façon suivante :

  • Contenus de formation donnés sous forme de vidéos. Chaque semaine, 10 à 14 vidéos d’une 10aine de minutes correspondant à des chapitres.
  • Des évaluations hebdomadaires obligatoires sous forme de QCM.
  • Trois rédactions (« essays » de 500, 1000 et 1500 mots) qui permettent aux apprenants de mettre en pratique les connaissances acquises au travers de cas pratiques.
  • L’obligation d’atteindre un score de 80% sur l’ensemble des activités pour l’obtention du certificat.
  • Un forum de discussion (très utilisé) pour l’ensemble des participants au cours.
  • Un wiki.
  • Des réunions « Coursera » inter-cours qui sont librement mises sur pied localement par des participants

L’investissement personnel de la part de l’étudiant est d’environ 3 heures par semaine.

Coursera - Liste des leçons

Plus qu’une simple vidéo d’un cours

Si les cours sont donnés par des professeurs universitaires, il ne s’agit cependant pas d’enregistrements vidéos de cours magistraux mais d’un contenu sur mesure, créé pour Coursera. Le professeur Kevin Werbach, qui fut l’enseignant des quelques 81’000 élèves virtuels durant les 6 semaines qu’a duré le cours, a ainsi préparé des contenus constitué à la fois d’un enregistrement vidéo, d’informations issues d’illustrations ou de schémas et d’ajouts écrits et dessinés au fil de sa présentation.

Coursera - Vidéo
L’outil va même plus loin que cela, grâce à l’insertion de questions au milieu des vidéos, parfois des QCU permettant d’évaluer sa compréhension de la vidéo, parfois des pistes de réflexion basée sur le contenu. Par exemple, après avoir présenté les différentes sources de motivations d’un joueur (sujet du cours traitant de la gamification), le professeur Werbach nous demande de réfléchir à notre jeu favori et d’identifier les leviers motivationnels présents dans celui-ci, on dépasse le rôle de simple orateur passif. Il en va de même lorsqu’il nous envoie consulter un exemple de site internet, avant de commenter le contenu de celui-ci.

Les outils que Coursera met à disposition des enseignants permettent ainsi d’aller au-delà d’une simple vidéo d’un cours donné en salle. Il m’est d’ailleurs même arrivé de hocher la tête ou de répondre aux sourires du professeur Werbach, tant le dispositif peut donner l’impression d’interagir avec l’enseignant. Cette méthode de transmission de la connaissance est donc à mes yeux une belle réussite.

 

L’évaluation des connaissances acquises

La présence d’évaluations est un élément constitutif du concept de cours et le distingue d’une bibliothèque de ressources. Elles impliquent de consacrer du temps et de la concentration aux contenus afin d’en tirer les éléments importants. Plus encore, elles instaurent un rythme et des deadlines. En ce sens, elles sont donc un facteur important du maintien de l’engagement.

Sur Coursera, deux formes d’évaluations sont exploitées :

  • les évaluations à correction automatique (QCM/QCU)
  • les évaluations par les pairs.

Les évaluations de type QCM suivent chaque chapitre et permettent, en une 12aine de questions, d’évaluer sa compréhension de la matière. Elles ont également été utilisées de manière plus riche par le professeur Werbach grâce à des liens externes : certaines questions impliquent la consultation d’un site ou d’une vidéo avant de pouvoir y répondre. L’esprit d’analyse est ainsi également mis à contribution.

Pour atteindre le certificat, il était également nécessaire de réaliser trois rédactions (essays) basées sur l’analyse de cas pratiques. Le professeur ne pouvant évidemment pas corriger plusieurs dizaines de milliers de rédaction en une semaine, Coursera gère cet obstacle en instaurant la correction par les pairs : chaque participant doit évaluer le travail de 5 autres participants et voit sa propre rédaction évaluée de la même manière par 5 personnes.

Coursera - Evaluations
Ce système présente des avantages et ses inconvénients. C’est une réponse créative à l’impossibilité d’évaluer correctement un travail rédactionnel par un outil automatisé. En réalisant ces rédactions, je suis retourné bien plus souvent aux vidéos du cours que je ne l’aurais fait sans cela, en quête d’arguments ou d’éléments sur lesquels me baser pour ma rédaction.

De plus, la nécessité d’évaluer 5 autres rédactions m’a permis de comparer les pistes d’analyse que j’avais choisies avec celles d’autres personnes, ce qui offre l’opportunité de confronter indirectement des points de vue et des compréhensions du cours. Il en résulte cependant un (potentiel) point faible : malgré les guides qui nous sont donnés pour corriger et évaluer les travaux, nous sommes nous-mêmes des novices dans le domaine étudié. La correction par les pairs n’est pas à l’abri d’évaluation faussées par des participants ayant mal compris certains aspects du cours. Elle reste cependant un moyen pertinent d’évaluer un travail d’analyse lors d’une formation à distance et ses bénéfices compensent à mon avis largement ses faiblesses. A noter également que tous les cours  de la plate-forme n’utilisent pas cette forme d’évaluation.

 

La force du dispositif : le « presque live »

Onze heures de vidéos de contenu plus quelques cinq à six heures de questionnaires et rédactions, le tout en 6 semaines : cela demande de l’engagement et de la régularité, ainsi qu’une bonne dose de motivation pour les maintenir.

Suivre un cours sur Coursera ne s’aborde pas comme l’utilisation de ressources en libre consultations, mais bien comme une formation à part entière, qui implique d’aménager du temps durant toute la durée du cours. En d’autres termes, cela peut être contraignant.

Qu’est-ce qui fait que cela marche ? La motivation personnelle et l’intérêt pour la matière est un élément de réponse, mais également le déroulement des 6 semaines de cours. Coursera réussit à être plus qu’une ressource en ligne en ajoutant de l’interaction à tous les niveaux. Les participants peuvent échanger sur le cours et son contenu par le biais d’un forum de discussion. De cette manière, lorsque l’enseignant invite dans une vidéo à réfléchir à des exemples, il encourage également à venir discuter de ces exemples sur le forum. Et ça marche : le forum a été, durant les 6 semaines de cours, un lieu d’échange très actif. Les participants sont également en contact entre eux par le biais des commentaires donnés lors des évaluations par les pairs. La conscience d’être nombreux à suivre le cours simultanément est un facteur de motivation important et donne envie de ne pas perdre le rythme.

Enfin, le rôle de l’enseignant en tant qu’animateur de ces 6 semaines est déterminant. Le professeur Werbach enregistrait ses vidéos au fil de l’avancement du cours, ce qui lui permettait de commenter dans un chapitre les retours faits sur le forum à propos du précédent. Encore une fois, cela permet de percevoir le fait que, malgré l’outil informatique, une « salle de classe » est en train de travailler ensemble. Coursera parvient ainsi à faire ressentir la motivation et l’envie d’avancer que l’on retrouve dans une formation présentielle.

 

Mon avis en résumé

Assurément, le dispositif proposé par Coursera est plutôt convaincant et le professeur Werbach a très bien su le prendre en main. Les contenus sont vivants, les exemples concrets très nombreux, et les QCM basés sur la consultation de sites ou vidéos m’ont permis d’obtenir en quelques semaines un très large aperçu de ce qu’est (et sera) la gamification. Il ne fait aucun doute que ce premier cours suivi ne sera pas le dernier.

Attention cependant : avant de vous lancer dans une formation coursera, assurez-vous d’en avoir le temps. Certains cours demandent plus de 10h par semaine et durent plusieurs mois ! C’est un réel engagement personnel. Je suis également curieux de tester un autre cours afin de voir quelle part du succès du cours Gamification revient aux outils Coursera et quelle part résulte du talent de l’enseignant.

 

J’aime

  • Des vidéos au contenu créé spécifiquement pour le cours, et pensées pour une formation en ligne
  • La conscience qu’enseignants et apprenants sont mobilisés en même temps sur la formation
  • Des évaluations sous forme de rédaction nécessitant de l’analyse et de la créativité

j’aime pas

  • Des évaluations par les pairs dépendant en partie de la bonne compréhension du cours par les correcteurs
  • Forte mobilisation nécessaire durant la durée du cours, il n’est pas possible d’adapter le rythme et la durée de la formation au temps que l’on a à disposition (à l’inverse, le rythme imposé est aussi un facteur de motivation).

 

Liens utiles :

Le site Coursera
La page du cours Gamification sur Coursera
L’apprentissage par le jeu tel que nous l’appliquons

Un commentaire sur “Coursera : témoignage et retour d’expérience d’un « diplômé »

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